Alors que la région a connu un été sans fin, le deuxième plus chaud jamais enregistré, la vigne a offert aux vignerons une leçon magistrale de résilience. Elle ne s’est pas contentée de s’adapter, elle a donné le meilleur dans l’adversité, offrant un millésime à l’équilibre stupéfiant.
Le caractère solaire et précoce du millésime s’affirme tout au long de l’année, entraînant un déficit hydrique en hiver et une floraison qualitative dès la seconde moitié de mai. Seule exception, la dernière semaine de juin, quand des orages apportent 56mm de pluie. Les 136mm de précipitations du mois permettent à la plante de constituer une réserve en eau suffisante pour passer le cap d’un été torride.
Le savoir-faire de nos équipes dans les travaux viticoles a été déterminant pour accompagner la vigne dans cette ère nouvelle. Des gestes « respectueux du vivant », selon Bruno Clenet, notre chef de culture, qui privilégie l’effeuillage sur mesure adapté à la vigueur de chaque parcelle. L’absence de griffage et le travail des sols plus en surface pour limiter l’évaporation tout en protégeant le chevelu racinaire, ou encore les semis d’automne qui continuent cette année à favoriser la vie microbienne.
Malgré l’intensité et la durée de l’ensoleillement, nous ne pouvons pas parler de canicule, car les températures diurnes, frôlant les 40 degrés, pouvaient descendre de presque 20 degrés une fois la nuit tombée, offrant même une rosée matinale salutaire. La dégustation des baies a conforté notre décision de donner le coup d’envoi des vendanges dès le 8 septembre. « Il ne fallait pas prendre peur » reconnaît Bruno Clenet, confronté au décalage entre les données de mesure de l’acidité et la réalité des dégustations dans les parcelles. Ces vendanges, parmi les plus longues et sereines de la propriété, se sont étalées sur 20 jours.
Ce sont de petites baies au potentiel colossal qui passent la porte du cuvier. « Une récolte hors du commun en terme de densité, extrêmement saine, même si on ne savait pas trop à quoi s’attendre, car nous n’avions pas les équilibres habituels » confie Didier Thomann qui, de mémoire de maître de chai, n’a « jamais vu ça » depuis ses premières vinifications en 1982 !
Toute l’équipe du Château salue l’incroyable concentration des jus et leur couleur intense dès l’entrée en cuve ! Les remontages tout en douceur exaltent ce millésime à la fois « puissant et onctueux », selon Isabelle Davin, oenologue. Elle souligne que « La qualité des vins de presse est à l’image des dégustations des baies et des pépins à l’aube des vendanges. C’est souvent à ce détail que se reconnaissent les grands millésimes ».
Un millésime inouï, où la trame tannique imposante est accompagnée d’une généreuse suavité. Cette infinie douceur présage la capacité de ce Léoville Poyferré 2022 à traverser les âges.